Ce qu’il faut retenir
Suite à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur l’article 151 septies du CGI (dans sa version antérieure au 30 décembre 2010), le Conseil Constitutionnel a jugé inconstitutionnelle la condition d’inscription au RCS du loueur en meublé, pour bénéficier de l’exonération des plus-values professionnelles.
La condition d’inscription au registre du commerce et des sociétés (RCS) n’est donc pas indispensable pour apprécier l’exercice à titre professionnel de la location meublée. Cette condition est, en effet, quasi impossible à satisfaire pour les personnes physiques, puisque cette activité n’est pas commerciale par nature. Seules les personnes ayant la qualité de commerçant et exerçant des actes de commerce peuvent normalement prétendre à cette inscription (c. com. art. L. 123-1 ; L. 121-1).
Notez que l’ancien article 151 septies définissait les conditions dans lesquelles l’activité de location en meublé est exercée à titre professionnel. Cette définition a été déplacée au 2 du IV de l’article 155 du CGI, par la loi de finances rectificative pour 2010.
Conséquences pratiques
La censure de la condition d’inscription au RCS pourrait avoir des conséquences prochaines sur la distinction entre les loueurs en meublé professionnels et non professionnels.
En effet, si cette condition d’inscription au RCS disparaît, la définition du loueur en meublé professionnel tiendrait aux deux seules conditions de seuil prévues à l’article 155 IV du CGI, qui sont :
- les recettes locatives annuelles brutes représentent plus de 23 000 € TTC ;
- les recettes locatives annuelles brutes sont supérieures aux revenus nets du foyer fiscal soumis à l’Impôt sur le Revenu dans les catégories des traitements et salaires au sens de l’article 79 du CGI(salaires, pensions, rentes), des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) autres que ceux tirés de l’activité de location meublée, des bénéfices agricoles (BA), des bénéfices non commerciaux (BNC) et des revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 du CGI.
Ainsi, l’inscription au RCS ne serait plus une condition sine qua non permettant l’appréciation de l’exercice à titre professionnel du loueur en meublé.
BOI-BIC-CHAMP-40-10 § 70
Pour aller plus loin
Contexte
Le Conseil Constitutionnel a été saisi par le Conseil d’Etat d’une question prioritaire de constitutionnalité, portant sur la conformité de l’article 151 septies, dans son ancienne rédaction.
Par une décision du 8 février 2018, le Conseil a jugé contraires à la Constitution les mots « inscrites en cette qualité au registre du commerce et des sociétés », ainsi que le mot « trois » de ces dispositions.
Faits et procédure
Un contribuable exerce, en tant que personne physique, une activité de loueur en meublé. A l’issue d’un contrôle fiscal, l’administration lui a refusé le bénéfice du régime fiscal du loueur en meublé professionnel au motif qu’aucun des membres de son foyer fiscal n’est inscrit au RCS en cette qualité.
Il a été mis à sa charge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales.
Ses contestations ont été vaines, devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et devant la Cour Administrative d’appel de Versailles. Suite à ces rejets, il forme un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat, et fait part de sa QPC portant sur le paragraphe VII de l’article 151 septies, dans ses rédactions applicables au litige.
Dans le cadre de sa QPC, le contribuable expose que l’article 151 septies impose une formalité impossible à accomplir pour les personnes physiques loueurs en meublé : l’inscription au RCS en cette même qualité.
Arrêt
Le Conseil constitutionnel a tout d’abord recherché l’objectif poursuivi par le législateur. Dans la rédaction de l’article 151 septies : « le législateur a entendu empêcher que des personnes exerçant l’activité de loueur en meublé à titre seulement occasionnel en bénéficient» (de l’exonération des plus-values).
Cependant, les sages affirment que la condition pour atteindre cet objectif est inadaptée car impossible à réaliser dans les faits. En effet, l’article L.123-1 du Code de commerce dispose que seules les personnes ayant qualité de commerçant peuvent être inscrites au RCS. L’activité de loueur en meublé est civile par nature et empêche donc l’exercice d’actes de commerce, nécessaire à l’obtention de cette qualité.
La condition d’inscription au RCS a donc été jugée inconstitutionnelle, car méconnaissant les principes d’égalité devant les charges publiques.
Analyse
Effets de la décision
La décision concerne des dispositions qui ne sont plus en vigueur, puisque la définition de l’activité professionnelle a été transposée à l’article 155 du CGI. Cet article reprend la condition d’inscription au RCS (loi de finances rectificative pour 2010).
Ajustement avec la définition des biens professionnels à l’IFI
L’article 31 de la loi de finances pour 2018 supprime l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour le remplacer par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI).
Afin de bénéficier de l’exonération au titre des biens professionnels, les loueurs en meublé n’ont plus besoin de répondre à une condition d’inscription au RCS.
En effet, ils doivent répondre aux trois conditions cumulatives suivantes :
- Les recettes locatives annuelles brutes représentent plus de 23 000 € TTC ;
- Les revenus nets tirés de l’activité de location meublée représentent plus de 50 % des revenus professionnels
- L’activité constitue l’activité professionnelle principale de l’exploitant.
Incidences sur le régime social : activité exercée en direct
Si le loueur exerce son activité en entreprise individuelle, depuis le 1er janvier 2017, son affiliation à la sécurité sociale des indépendants (ex RSI) est obligatoire si ses recettes sont supérieures à 23 000 € TTC et si l’une ou l’autre de ces conditions est remplie :
- Les locaux sont loués à une clientèle y effectuant un séjour à la journée, à la semaine ou au mois et n’y élisant pas domicile (location saisonnière)
- Un membre du foyer fiscal est inscrit au registre du commerce et des sociétés (RCS) en qualité de loueur meublé.
Si l’on extrapole la décision du Conseil Constitutionnel, seuls les loueurs ayant des recettes supérieurs à 23 000 € TTC et effectuant de la location saisonnière seraient obligatoirement affiliés au RSI.
Source : Fidroit