Ce qu’il faut retenir
Le changement d’usage de locaux d’habitation est soumis à autorisation préalable dans les communes de plus de 200 000 habitants ainsi que dans celles des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.
Cette règle d’ordre public s’applique également aux locaux loués par bail mixte d’habitation et professionnel. Un bail professionnel conclu sans cette autorisation préalable est nul de plein droit.
L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 22 juin 2017 précise que l’importance respective des surfaces consacrées à l’usage d’habitation et à l’usage d’habitation est neutre.
Conséquences pratiques
Préalablement à la signature du bail, il est indispensable de s’assurer que les autorisations nécessaires au changement d’affectation ont bien été obtenues.
A défaut, le bail serait en effet frappé de nullité.
De plus, l’utilisation du logement ne doit pas être contraire à la destination de l’immeuble figurant dans le règlement de copropriété.
Lorsque les locaux sont situés dans un immeuble en copropriété, il faut donc également consulter le règlement de copropriété afin de s’assurer que le changement d’usage est possible, et, si tel est le cas, à quelles conditions.
Pour aller plus loin
Contexte
Les articles L. 631-7 et L. 631-7-1 du Code de la construction et de l’habitation (CCH) imposent d’obtenir une autorisation administrative préalable pour les changements d’usage concernant les immeubles d’habitation situés dans les communes de plus de 200 000 habitants ainsi que dans celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.
Cette autorisation est requise si les locaux étaient affectés à l’habitation au 1er janvier 1970.
Elle est délivrée par le Maire de la commune de situation de l’immeuble, après avis du Maire d’arrondissement concerné pour les villes de Paris, Marseille et Lyon.
L’autorisation de changement d’usage est accordée à titre personnel. Elle peut néanmoins avoir un caractère réel, c’est-à-dire attaché au local, si l’autorisation est subordonnée à une compensation. Dans cette hypothèse, le propriétaire présente un autre local affecté à un usage autre que l’habitation qu’il s’engage à transformer en habitation.
Les faits de l’arrêt du 22 juin 2017 concernaient des locaux faisant l’objet d’un bail mixte d’habitation et professionnel.
Faits et procédure
Un bail mixte portant sur des locaux à usage de cabinet d’avocat a été conclu le 1er janvier 1978 et renouvelé pour une durée de neuf ans le 1er mars 2004.
Le 29 mars 2012, les bailleurs délivrent aux locataires initiaux un congé à effet du 30 septembre 2012.
Le 26 juillet 2012, les propriétaires consentent à de nouveaux locataires un bail professionnel portant sur les mêmes locaux.
Ces locaux n’ayant pas été libérés à l’issue du congé, les propriétaires assignent les locataires initiaux en expulsion et dommages-intérêts. Ces derniers invoquent alors la nullité du bail du 26 juillet 2012 pour non-respect des dispositions de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation.
La Cour d’appel ayant prononcé la nullité du bail, les bailleurs se pourvoient en cassation.
Arrêt
Après avoir affirmé que les dispositions de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation s’appliquent aux locaux d’un bail mixte d’habitation et professionnel, la Cour de cassation rejette le pourvoi en constatant que les locaux loués étaient affectés partiellement à un usage d’habitation au 1er janvier 1970.
En conséquence, elle précise que l’importance respective des surfaces consacrées à l’usage d’habitation et à l’usage professionnel est indifférente à l’application de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation.
Puisque les bailleurs n’avaient pas obtenu l’autorisation d’affecter la totalité des lieux à un usage professionnel, la Cour de cassation considère que la Cour d’appel en a déduit à bon droit que le bail du 26 juillet 2012 devait être annulé.
Analyse
Cette décision reprend une solution déjà dégagée par la jurisprudence dans le passé (voir notamment Cass. civ. 1 28 oct. 2015, n° 14-17518) : le bail conclu sans autorisation préalable de changement d’usage concernant des locaux mixtes à usage partiel d’habitation est nul.
Par l’arrêt rendu le 22 juin 2017, la Cour de cassation apporte une précision supplémentaire en relevant que le fait qu’une partie minoritaire des locaux soit affectée à usage d’habitation (17 % en l’espèce) ne permet pas de se soustraire à l’application de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation.
Elle constate également, de manière incidente, qu’il ne peut être reproché aux locataires d’avoir mis en œuvre les moyens légaux dont ils disposaient car l’enjeu du litige était important pour eux : il s’agissait de préserver leur identité professionnelle auprès de leur clientèle qui les connaissait à cette adresse depuis 1978.
Source : Fidroit